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L’ACSM demande l’abandon du projet de permettre les détentions liées à l’immigration dans les prisons fédérales 

L’Association canadienne pour la santé mentale (ACSM) s’inquiète sérieusement de la récente proposition du gouvernement fédéral d’utiliser ses pénitenciers à des fins de détention liée à l’immigration ou à des demandes d’asile, lorsqu’aucun crime n’a été commis, et même en présence d’un trouble de santé mentale. Détenir dans des établissements correctionnels des personnes migrantes ou demandeuses d’asile qui ont des problèmes de santé mentale est punitif et contraire aux normes internationales relatives aux droits de la personne. Cette mesure aurait également des effets dévastateurs sur la santé mentale de personnes déjà marginalisées, dont bon nombre cherchent à échapper à des persécutions ou à se rétablir d’expériences traumatisantes.  

Pendant des années, le gouvernement du Canada s’est appuyé sur les établissements correctionnels des provinces pour détenir des personnes migrantes ou demandeuses d’asile n’étant accusées d’aucun crime. Cependant, toutes les provinces ont maintenant entrepris de mettre un terme à l’utilisation de leurs prisons à cette fin par le gouvernement fédéral. Les provinces ayant résilié leur entente avec le fédéral, ce dernier a proposé dans son budget de 2024 un investissement de 325 millions de dollars pour accroître, d’une part, la capacité de ses prisons à détenir des personnes migrantes et demandeuses d’asile, et d’autre part, ses pouvoirs en la matière.  

Les conditions de détention liée à l’immigration peuvent être hautement préjudiciables, même pour des gens qui n’ont pas de trouble de santé mentale au moment de leur enfermement. Dans un rapport de 2021 d’Amnesty International et de Human Rights Watch des personnes ont indiqué « à quel point la détention avait affecté leur bien-être » en entraînant une détérioration de leur fonctionnement, ou même des idées suicidaires. Les dommages psychologiques causés par la détention liée à l’immigration ont été largement documentés dans la littérature médicale canadienne et internationale; ces dommages sont d’autant plus sévères lorsque, comme c’est le cas au Canada, la durée d’une détention est indéterminée, c’est-à-dire sans date de libération connue. 

En tant qu’administratrice du système de détention liée à l’immigration, l’Agence des services frontaliers du Canada n’est pas assujettie à une surveillance civile indépendante et dispose de prérogatives importantes dans la prise des décisions concernant les détentions, y compris celles qui mènent à l’enfermement d’une personne. L’Association canadienne pour la santé mentale est profondément préoccupée par le fait que des personnes migrantes et demandeuses d’asile ayant des problèmes de santé mentale et de santé liée à l’utilisation de substances ou des dépendances, dont certaines connaissent aussi la pauvreté, l’insécurité du logement et une difficulté d’accès à du soutien communautaire, seront criminalisées sans justification et subiront un traumatisme supplémentaire en raison de cette proposition budgétaire. 

En tant qu’organisme communautaire du secteur de la santé mentale le plus vaste au pays, l’Association canadienne pour la santé mentale ajoute sa voix à celles de dizaines d’organismes de différents secteurs, afin d’implorer le gouvernement fédéral de renoncer à son projet concernant l’utilisation de ses pénitenciers. Le Comité sénatorial permanent chargé d’étudier cette proposition a déjà recommandé que la mesure prévue dans la Loi d’exécution du budget ne soit pas adoptée. 

Comme toutes les personnes vivant au Canada, celles qui cherchent à y migrer ou à y obtenir l’asile et qui ont des besoins de santé mentale méritent d’avoir accès au soutien et aux traitements nécessaires, plutôt que d’être incarcérées et punies. En renforçant l’accès à des solutions de rechange à la détention, en investissant dans les déterminants sociaux de la santé, en éliminant les obstacles dans l’accès aux services de santé mentale et de santé liée à l’utilisation de substances offerts dans les communautés – notamment, en nous opposant à l’exclusion des services communautaires de santé mentale de la Loi canadienne sur la santé – nous pouvons concrétiser la vision d’un Canada qui soutient la santé mentale comme droit universel de la personne.