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La justice en matière de santé mentale, maintenant 

Notes d’une table ronde du Sénat sur la parité en santé mentale

Margaret Eaton, Cheffe de la direction nationale de l’ACSM 

Septembre était le Mois national de sensibilisation au rétablissement et à cette occasion, j’ai participé, avec des collègues de la filiale d’Ottawa de l’ACSM, à une table ronde du Sénat tenue le 20 septembre. J’aimerais faire part de certaines des discussions qui ont eu lieu lors de cette réunion. La table ronde a été organisée et animée par la sénatrice Sharon Burey, pour donner suite à son interpellation au Sénat à propos de la parité (ou plutôt de la disparité) entre santé mentale et santé physique. Son objectif était d’explorer les enjeux et de discuter de solutions possibles.

Tout d’abord, vous vous demandez peut-être ce que j’entends par « parité »; elle consiste à fournir un accès équitable aux services en matière de santé mentale, de dépendances et d’utilisation de substances, par rapport aux services de santé physique. Mais surtout, la parité signifie accorder la même valeur à la santé mentale et à la santé physique. La valeur que nous attribuons à ces deux aspects de la santé détermine quelle part des investissements est allouée aux services relatifs à chacun d’entre eux. À l’heure actuelle, nous ne leur accordons pas la même valeur, mais nous devons le faire.

Avec sa voix percutante, Lynne Vail, vice-présidente du conseil d’administration de l’ACSM d’Ottawa, s’est appuyée sur son vécu pour parler ouvertement de son expérience par rapport aux lacunes dans les services offerts, lorsqu’elle a eu recours à notre système de santé pour des problèmes de santé mentale chroniques. Elle a également parlé du rôle essentiel des soins communautaires dans son rétablissement et des services vitaux qu’elle a reçus à l’ACSM d’Ottawa. En racontant son histoire, Lynne a contribué à cristalliser l’urgence d’atteindre une parité entre les soins de santé physique et mentale.

Un accès équitable aux services de santé physique et aux services de santé mentale ne peut exister sans que nous leur accordions une valeur égale. Au Canada, obtenir des soins efficaces en matière de santé mentale et d’utilisation de substances est trop souvent possible uniquement pour les gens qui ont les moyens de les payer, soit une infime partie de notre population. En effet, le Dr Alexander Caudarella, directeur général du Centre canadien sur les dépendances et l’usage de substances, a indiqué que les taux de traitement au Canada sont inférieurs de moitié à ceux de l’Europe. D’autres données montrent que près de 8 % de la population canadienne déclare avoir des besoins non satisfaits en matière de soins de santé mentale.

Le manque d’accès aux services essentiels constitue une grande partie du problème auquel nous faisons face au Canada. Une autre composante du problème concerne le manque de continuité entre ces services (lorsqu’ils existent) et le fait que, généralement, ils ne sont pas conçus pour tenir compte des déterminants sociaux de la santé, ni pour traiter la personne dans sa globalité. À l’opposé, nos filiales de l’ACSM s’efforcent d’offrir au sein des communautés des soins dits « intégrés »; ils vont au-delà des programmes et des services se rapportant directement à la santé mentale et aux dépendances, pour soutenir la personne tout au long de son parcours de rétablissement. Les soins intégrés touchent autant la littératie et les programmes en santé mentale, y compris les efforts de prévention du suicide, que l’aide apportée aux personnes qui tentent de s’y retrouver dans les différents services et systèmes, qui cherchent un logement ou qui souhaitent obtenir les prestations d’invalidité auxquelles elles ont droit. Les services intégrés sont un aspect fondamental de la parité des soins de santé mentale, car même si une personne reçoit le meilleur traitement possible, l’une des conditions fondamentales d’un rétablissement réussi et durable est négligée si elle n’a pas de domicile.

Les organisations communautaires de santé mentale et de santé liée à l’utilisation de substances comme la nôtre ne font pas partie du système de soins primaires, et sont sous-financées et dépendantes de la générosité des personnes qui ont la capacité de donner. En outre, elles sont souvent exclues des conversations clés avec les décisionnaires sur les soins de santé, et négligés dans la collecte des données qui éclairent les besoins de notre système de santé. Ainsi, la table ronde a permis d’engager une conversation importante. De nombreuses personnes présentes dans la salle ont fait écho à nos réflexions. Des personnes comme la Dre Theresa Tam, l’administratrice en chef de la santé publique du Canada. Elle s’est exprimée sur la parité dans l’accès aux soins, qui passe notamment par davantage d’interventions en amont et par une optique d’équité dans la planification et dans l’offre des services de santé mentale et de santé liée à l’utilisation de substances.

Le sénateur Stan Kutcher a quant à lui déclaré que nous ne pouvions pas continuer à faire les choses comme nous les avons toujours faites. Nous sommes tout à fait d’accord. Nous avons besoin de justice en matière de santé mentale, et nous en avons besoin maintenant. Heureusement, l’ACSM continue d’être une partie prenante précieuse aux yeux des décisionnaires de tous les paliers de gouvernement au Canada. L’ACSM est reconnaissante de prendre part à des conversations importantes, comme celle qui a eu lieu lors de la table ronde, pour défendre, avec le soutien de dizaines d’organisations de partout au Canada, les intérêts de personnes qui ont moins souvent la possibilité d’être entendues. C’est pourquoi nous demandons à notre gouvernement de modifier la Loi canadienne sur la santé pour que les soins en matière de santé mentale et de dépendances passent de l’ombre à la lumière et soient traités sur un pied d’égalité avec les soins de santé physique. Nous ne pouvons plus attendre.