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Prévenir les décès liés aux drogues

L’an dernier, 8 049 personnes sont décédées au Canada de causes apparemment liées à une intoxication aux drogues, ce qui représente 22 décès par jour en moyenne. La plupart de ces décès étaient accidentels, c’est-à-dire que les personnes ayant utilisé des drogues ne souhaitaient pas mourir. 

Nous traversons une période sans précédent de méfaits liés aux drogues. Et pourtant, la situation suscite une profonde incompréhension quant à la nature de l’approvisionnement en drogues toxiques et à la complexité des phénomènes d’utilisation de substances psychoactives et de dépendances. Ainsi, selon un récent sondage réalisé pour le compte de l’Association canadienne pour la santé mentale – Division de l’Ontario, le quart des gens pense que « les personnes qui font une surdose d’opioïdes ont ce qu’elles méritent ». 

Nous pouvons prévenir les décès liés aux drogues. Cette année, la Journée internationale de sensibilisation aux surdoses se tient sur le thème « Ensemble, nous pouvons », soulignant l’importance d’obtenir l’appui de la collectivité pour réduire les méfaits liés aux drogues. Et pour y arriver, nous devons arrêter d’essayer d’interdire les drogues. Nous devons cesser de dévaloriser et de criminaliser les personnes qui utilisent des drogues. Et nous devons faire tout en notre pouvoir pour réduire les méfaits associés à cette utilisation.  

Voici comment nous y prendre:  

Dépasser la dichotomie « nous » vs « elles et eux » : déstigmatiser l’utilisation de substances psychoactives et favoriser la sécurité et le mieux-être  

Les gens utilisent des substances pour de nombreuses raisons : pour relaxer ou pour le plaisir, ou encore pour composer avec les épreuves de la vie, la douleur physique ou un traumatisme. La plupart d’entre nous utilisent des substances psychoactives comme la caféine, l’alcool, le tabac, le cannabis, les médicaments sur ordonnance ou les psychotropes. L’utilisation de substances fait partie de l’expérience humaine, et ce, depuis des siècles. S’il est vrai que plusieurs d’entre nous ne subissent pas de conséquences néfastes graves après avoir utilisé des substances, certaines personnes peuvent éprouver des problèmes comme l’accoutumance ou la dépendance, être hospitalisées ou même mourir.   

La présence de substances comme le fentanyl, le carfentanil, les benzodiazépines et la xylazine dans l’approvisionnement en drogues non réglementées (et donc illicites) augmente énormément les risques associés à l’utilisation de telles drogues. Lorsqu’une personne en utilise, que ce soit lors d’une première expérience, de façon récréative pendant la fin de semaine, ou quotidiennement, elle s’expose à un risque d’intoxication.  

Voilà pourquoi il est plus exact de dire qu’au Canada, l’approvisionnement en drogues est « toxique » que d’évoquer la « crise des surdoses ». Les « surdoses » ou les pertes de conscience ne sont pas nécessairement dues au type de drogue ou à la quantité utilisée. Un seul grain de fentanyl ou de carfentanil peut être mortel.  

Peu importe les conditions dans lesquelles vous utilisez des substances psychoactives, il importe de connaître les risques et de le faire de la façon la plus sécuritaire possible. À cette fin, les campagnes de sensibilisation et l’éducation à propos des risques ont un rôle à jouer, particulièrement auprès des jeunes, de même que des règlements stricts relativement à la commercialisation, à l’emballage et à la distribution des substances légales. Pour lutter contre l’approvisionnement en drogues toxiques, il nous faut investir dans la réduction des méfaits et l’approvisionnement sécuritaire, et plaider pour la décriminalisation. Pour en savoir plus, rendez-vous à drugpolicy.ca (en anglais seulement). 

Réduire les risques 

Tout le monde peut réduire les risques liés à l’utilisation de substances : renseignez-vous. N’utilisez jamais de drogues sans la présence d’autrui. Visitez un site de réduction des méfaits. Procurez-vous de la naloxone, un antidote à l’intoxication aux opioïdes. Commencez par de petites quantités et allez-y lentement. Faites vérifier vos drogues. Plaidez en faveur de la décriminalisation. Restez en contact avec votre entourage. Parlez à quelqu’un. Demandez de l’aide. Offrez de l’aide. Écoutez. Répondez. Pour en savoir plus sur la naloxone, consultez canada.ca. 

Opter pour la décriminalisation  

À elle seule, la décriminalisation ne mettra pas fin à la crise des intoxications aux drogues au Canada. Mais il s’agit d’une étape essentielle. Les lois punitives sur les drogues, la prohibition et la surveillance policière ont pour effet de criminaliser les personnes qui utilisent des drogues, ce qui se répercute sur l’attitude de la population à l’égard de celles-ci. Si les arrestations pour possession simple sont censées avoir diminué au Canada, la présence policière autour des endroits où les gens utilisent des drogues et les sanctions qui limitent la possibilité de le faire font en sorte que l’utilisation de drogues continue d’être criminalisée. Or, la criminalisation des drogues fait en sorte de tracer une ligne entre les personnes qui sont vues comme « légitimes » et dignes de soins et de considération, et celles qui sont stigmatisées et vues comme illégitimes et indignes. Les recherches effectuées partout dans le monde aussi démontrent que la criminalisation des drogues n’en réduit pas l’utilisation. Au contraire, les personnes qui utilisent des drogues sont confrontées à une stigmatisation importante de la part des prestataires de soins, ce qui réduit la probabilité qu’elles obtiennent des traitements médicaux ou des services de réduction des méfaits. La décriminalisation a pour objectifs la sécurité et la dignité humaine.   

Réduire les méfaits et rendre l’approvisionnement plus sécuritaire  

La réduction des méfaits est une approche fondée sur des données probantes et axée sur la clientèle. Elle a pour but de réduire les méfaits pour la santé ainsi que les problèmes sociaux liés aux dépendances et à l’utilisation de substances, sans qu’il soit nécessairement question de viser l’abstinence ou un arrêt complet. Cette approche permet aux personnes qui utilisent des drogues d’exercer un plus grand contrôle sur leur vie et leur santé, puis de se protéger elles-mêmes tout en protégeant leur famille et leur communauté. La réduction des méfaits renvoie à des services d’utilisation supervisée, à la distribution de matériel, comme de l’équipement stérile d’injection et d’inhalation, à la vérification des drogues, à des programmes d’approvisionnement sécuritaire, qui permettent à des personnes qui utilisent des drogues d’obtenir des médicaments sur ordonnance, et à des politiques comme la décriminalisation.  

Il est important que les services de réduction des méfaits répondent aux besoins changeants sur le terrain. Pour y parvenir, les sites de réduction des méfaits au Canada devront être plus nombreux à être dotés d’une infrastructure qui permet aux gens d’inhaler des drogues, puisque l’utilisation par inhalation représente une part croissante, et maintenant majoritaire, des décès liés à une intoxication au pays. Cependant, à l’heure actuelle, les services de réduction des méfaits sont centrés sur les besoins des personnes qui utilisent des drogues par voie orale ou nasale, ou par injection.  

Soins de santé et soutiens sociaux  

Dans certains cas, l’utilisation de substances psychoactives est susceptible de devenir problématique en raison de causes sous-jacentes, comme un traumatisme, une souffrance psychologique ou des douleurs physiques. Pour veiller à la santé et au bien-être des personnes utilisatrices de drogues, l’une des clés est de donner à toutes celles qui le souhaitent un accès à un éventail complet de mesures de soutien en santé mentale et en dépendances ainsi qu’à des services de réduction des méfaits. Au Canada, les mesures de soutien en santé mentale et en dépendances sont sous-financées; les personnes qui tentent d’y avoir recours se heurtent parfois à des temps d’attente importants ou doivent en assurer le coût elles-mêmes. Nous vous invitons à lire notre récente lettre ouverte au ministre de la Santé, dans laquelle nous demandons la couverture complète des services en matière de dépendances et de santé liée à l’utilisation de substances dans notre système public et universel de santé.